Accord de libre échange UE-Tunisie : appel de la société civile.
le 15 février 2016 par Artisans du Monde
le 15 février 2016 par Artisans du Monde
Contexte : la Tunisie avait été le premier pays de la rive Sud à avoir signé avec l’Union Européenne un Accord d’Association en 1995, qui constitue toujours le cadre juridique de partenariat dans les domaines politiques, économiques, sociaux, scientifiques et culturels. Elle est également depuis janvier 2008, en zone de libre échange avec l’Union Européenne pour les produits industriels. Aujourd'hui, suite à la révolution et à la transition démocratique initié en 2011, la Tunisie et l’Union Européenne ont convenu de passer à un niveau supérieur et plus stratégique d’approfondissement de leurs relations de coopération...
Derrière cette belle façade de coopération (voir le site officiel), se cachent pour de nombreuses ONG et organisations de la société civile tunisienne (notamment le FTDES et l'AFTRURD avec qui nous avions travaillé durant le FSM de Tunis) des objectifs éloignés du progrés social attendu de tels accords... Asymétrie de l'accord au bénéfice des entreprises européennes, imposition de normes européennes, soumission à la libre concurrence de secteurs stratégiques et sensibles,etc.
Ainsi les signataires de cet appel dont ATTAC, AITEC, La Fédération ARtisans du MOnde aux cotés des structures tunisiennes, demandent à ce que l'accord soit réellement porteur de développement équitable, que les négociations soient transparentes et accessibles aux citoyens, et une évaluation indépendante de l'accord en négociation, sans quoi, cela pourrait mettre en péril la souveraineté du pays.
Déclaration de la société civile
À l’occasion du vote au Parlement européen sur l’ouverture des négociations d’un Accord de Libre-Echange entre la Tunisie et l’UE le 15 février 2016
Tunis, Paris, le 15 février 2016
A l’occasion du vote du comité INTA (Commerce) du Parlement européen sur l’ouverture des négociations pour un Accord de Libre Echange Complet et Approfondi (ALECA) entre la Tunisie et l’UE, prévu le 15 février 2016, les organisations de la société civile (OSC)–Euro-méditerranéenne, Tunisiennes et Françaises- cosignataires :
Déplorent le manque de perspectives de développement social que l’accord devrait intégrer et l’absence de prise en compte des spécificités du pays. Malgré les nombreuses annonces d’aide et de soutien à la Tunisie faites par l’Union Européenne à son « partenaire privilégié » suite à la réussite de sa transition démocratique, l’accord en cours de négociations n’intègre pas un changement de stratégie permettant à la Tunisie de répondre durablement aux défis de développement équitable et aux revendications de travail et de Justice sociale, principales revendications de la population durant le soulèvement de 2010-2011 et se contente d’un transfert des normes européennes vers la Tunisie.
Alertent sur l’asymétrie prévisible des bénéfices retirés par la Tunisie d’une part, et les pays de l’Union Européenne d’autre part, suite à l’application de l’accord. La compétitivité des entreprises tunisiennes n’est pas la même que celle de leurs homologues européennes, qui peuvent d’ailleurs bénéficier de subventions dans le secteur agroalimentaire, par exemple. Le risque qui pèse sur la société tunisienne est d’autant plus grand que l’ouverture des marchés tunisiens aux entreprises étrangères n’est pas soumise à l’obligation de recruter le personnel localement, de soutenir le tissu industriel local, ou encore de transférer les technologies. Cela pourrait avoir des conséquences désastreuses sur l’emploi et le développement. En outre, la prétendue réciprocité des échanges commerciaux facilitée par l’accord ne concerne pas les personnes : les Européens pourront toujours circuler librement tandis que les Tunisiens resteront suspendus à l’obtention de visas que les autorités des 28 pays membres ne délivrent qu’au compte-goutte et aux personnes appartenant aux élites économiques, scientifiques et culturelles. . Ceci est de nature à restreindre les possibilités d’exportation des services par les prestataires Tunisiens en Europe et à décourager les initiatives des entrepreneurs (surtout jeunes) sur les marchés européens alors que la réciproque n’est pas vraie.
Mettent en garde contre une réduction de la liberté de manœuvre de l’Etat Tunisien en ce que l’ALECA en cours de négociation, qui concerne des secteurs sensibles et clés de l’économie du pays, notamment ceux de l’agriculture, de l’énergie, du transport, de la santé, etc., soumet la liberté de l’Etat de réguler à l’obligation de protéger l’investissement, au nom de la « libre concurrence ».
Les OSC signataires recommandent vivement :
Les ONGs signataires tiennent à souligner que la non prise en compte de ces recommandations sur l’ALECA entre la Tunisie et l’UE peut mettre en péril la souveraineté du pays, asservir l’intérêt du pays à la logique marchande et menacer les droits fondamentaux du peuple tunisien, ce qui peut contribuer à aggraver la précarité de larges franges de la population et les exposer à des risques de basculement vers la violence et le fanatisme.
Organisations cosignataires :
Euro-méditerranéen :
26. Réseau Euro-méditerranéen des Droits humains (REMDH/EuroMed Rights)
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